mercredi 7 mai 2003

Volume 2

JOUR J-1:
Un gros papillon rose et bleu se jette sur moi dès le passage du filtre de la Cité PN de la Compagnie. Je l’évite de justesse, c’est en fait une Coréenne en costume traditionnel. Je débouche alors en plein combat de Taekwondo. Des cris aigus emplissent le hall. J’y suis, c’est le forum sur la Corée. Yoooiiihh ! Encore un bel exemple du dynamisme du CDR Asie qui n’hésite pas à employer en France des Coréennes et Coréens sans contrat de travail. Avant on appelait ça des esclaves, maintenant , le Centre de Lignes Asie appelle ça des des bénévoles. C’est fou ce que peut se permettre une entreprise qui embauche à grande échelle. Aujourd’hui, pour changer, je suis en civil et le sens rien qu’au confort de mes chaussures. J’abandonne le tatami pour aller à mon secteur pour mon VDC. Pour les néophytes, Vol de Développement des Compétences.
En bref, une demi-journée d’automasturbation autour des thèmes clefs tels qu’Organisation, Equipe, Produit et Client. Autrement dit, comment et sur quelle musique, j’entends danser le vol de demain avec mon instructeur.
Dès le premier contact avec ce dernier, je flaire la journée hautement productive. Son air abattu m’indique qu’il n’est pas fier de me servir cette nouvelle débilité censée remplacer le contrôle. Faut dire, raconter la veille, ce qu’on va essayer de faire le lendemain, fallait y penser. Pas chien et le sentant mal à l’aise, j’entame la conversation sur ses dernières vacances. ça, c’est le sujet bateau. Soulagé, il s’engouffre dans cette voie facile. Thaïlande, GP, Koh Samui, Pataya, jet ski, massage, diarrhée, tout y passe. On ne sort quand même pas l’album photos.
Une heure et quelques rouleaux de papier toilette plus tard, nous abordons à regret le VDC. Un vol sur Abidjan en A 340. Broder là-dessus, faut le faire ! Je m’y emploie ardemment en lui servant de la balise, du passager mystère. Pour l’achever, je saupoudre de ponctualité, bien sentie. Une heure est passée et j’ai choisi la séquence Organisation et plus particulièrement, la gestion du temps. Pas une bonne idée comme on le verra plus tard.
Il est midi et cette journée d’immo se termine et m’amène à un rapide calcul sur le coût de notre onanisme : 1/2 journée de cadre PNC soit charges comprises environ 1700 F plus 1300 F de journée Chef de Cabine Principal, ce qui fait 3000 F la séance de pignole. Mon portefeuille d’actions en frémit.

JOUR J:
H - 2h15:
Je pointe à la banque après vingt minutes de quête d’une place dans les sous-sols du parking de la Cité. Curieusement la composition d’équipage semble complète. Je reste néanmoins sur mes gardes. Méfiance.
Dossier de vol remis à jour, fiches récapitulatives, fiches de sécurité, etc… Je file droit vers la salle de briefing en laissant le stand AIR à sa présentation du nouveau parfum Kenzo. Toujours personne en salle sécurité des vols. Je dépose le dossier dans la salle de briefing la plus élaborée en matière de communication puisqu’elle possède la particularité d’un pilier central. Mon cadre arrive et me propose un café. Nous devisons quelques instants sur son inexpérience en tant que CCP qui lui permet d’avoir une approche relative du poste. Car il faut le savoir, les cadres PNC, anciens CCP, sont un peu comme les poissons volants et ne constituent pas la majorité du genre.
H - 1h 45:
Les deux autres CC arrivent. Surprise, aucun des deux n’est réglementaire. Top sécurité. Je décèle en cela la «Safety Touch» de l’élaboration qui n’a rien à foutre des qualifications CC.
Nous allons voir le Commandant de Bord à la Préparation des vols. A peine la tête dans le box n°11, Le CDB et le copilote m’informent, l’un sur sa femme en accompagnante et l’autre sur son compagnon qui feront la rotation avec nous. Une fois débattu du sujet crucial de leur surclassement, nous abordons les futilités telles que les deux CC non règlementaires et les mesures sûreté. Je dis au commandant qu’il s’agit d’un VDC, ce à quoi il me répond: « Fais un comptage pendant le roulage, ça fera bien pour ton contrôle». Je sens tout de suite qu’on va être en phase question procédures !
H - 1h30:
Je n’en reviens pas, tout le monde est là en salle de briefing. Je ne vois pas tout le monde, mais c’est normal, c’est le pilier central. Positionnement PNC, peu de client pour l’Espace, mauvais souvenir de l’assiette apéritive sans doute… Briefing commercial des CC. Je pensais finir avec la sécurité sûreté lorsque le commandant entre dans la salle pour nous présenter sa femme et leur projet de location d’avion à Abidjan pour aller passer la journée à Yamoussoukro. En guise de briefing sécurité mais au top du CRM, je note la liste des PNC intéressés par la balade.

H -1h15:
Les tarifs de la balade en avion ont été approximatifs et de ce fait certain PNC se désistent déjà en salle bagages une fois la conversion faite. Le parcours finement étudié des navettes nous vaut dix minutes de bouchon avant le filtre de piste.

H - 50’:
Je sens que j’ai eu le nez creux de choisir l’item «Gestion du temps» car avec dix minutes de bourre, nous ne sommes toujours pas à l’avion. Prise en charge de l’avion entre camions SERVAIR mal positionnés et pleins de carburant en cours. Du moins, je devine les pleins à l’odeur de kérosène puisque les PNT observent la plus grande discrétion à ce sujet. La vidéo Rockwell me semble capricieuse dès le premier contact. Dix bonnes minutes sont nécessaires pour l’initialiser après un reset complet.
Je mets la musique d’ambiance qui distille des extraits plaintifs de Mme Butterfly. C’est alors que j’entends des cris et des hurlements dans le fond de la cabine. Je pense immédiatement qu’il s’agit d’un UM effrayé par la nouvelle harmonie Tempo. Plus j’avance, plus la plainte se fait douloureuse. C’est pas un UM mais un DEPA (passager réfoulé du territoire accompagné de policiers) qui comme l’indique son code est accompagné de deux policiers. Vaut mieux car il s’agit d’un tueur de grand mère qui voyoutait dans le 13ème arrondissement. L’embarquement se fait donc en Tempo sur fond de plaintes et de pleurs qui s’accordent bien avec Mme Butterfly mais surprennent tout de même nos passagers déjà choqués par les rayures multiples. Gros succès commercial de cet embarquement sur fond de coups et de bourrades apaisantes.
H - 5’:
Roulage.
H +20’:
Comme pourrait le dire en termes châtiés un membre du Conseil d’Administration, l’ambiance cabine est «gravement impactée» par le DEPA qui s’est chié dessus de trouille. Retour parking. Débarquement du trublion.

H + 40’:
Appel du nettoyage sans succès.
Répondant au message universel du HUB et de sa ponctualité légendaire, nous recommençons le roulage dans une épouvantable odeur qui n’est pas sans rappeler celle des toilettes de l’A310. Les spécialisés apprécieront. Toujours content de mon choix «Gestion du temps»…
A suivre…

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